Et si l’inflation était votre meilleur allié financier ?
Il en est question tous les jours depuis la crise sanitaire : l’inflation pourrait revenir. Deux raisons concordantes vont dans ce sens : la hausse du prix des matières premières et l’endettement des états.
La première, parce qu’elle a un impact mécanique sur le prix des biens d’équipement et de consommation : si les prix des fournisseurs augmentent, ces hausses seront répercutées sur le client final.
La seconde, parce qu’une bonne façon de diminuer le poids de la dette d’un état, c’est de laisser courir l’inflation : quand on a financé sa dette en empruntant à 0 % par an, et que l’inflation monte à 10 % par an, c’est comme si une ardoise magique effaçait 10 % de la dette tous les ans. C’est le moyen qu’ont choisi les états après la seconde guerre mondiale pour réduire leur endettement du à l’effort de guerre.
De façon générale, les salaires sont indexés sur l’inflation. Pas d’impact donc, pour les particuliers, dans leur équilibre recettes – dépenses : les deux postes évoluent au même rythme. Par contre, il n’est est pas de même des placements. Un point change tout : les taux d’intérêts sont-ils fixes ou variables ?
Quelles seraient les conséquence d’un retour de l’inflation sur votre épargne ?
Placements réglementés : rien de nouveau
Commençons par les placements règlementés comme le Livret A : son taux de rémunération est fixé proportionnellement à l’inflation. Quand la hausse des prix diminue, le régulateur baisse son taux d’intérêt. Si l’inflation augmente, la rémunération des placements règlementés suivra. On ne fait jamais fortune, mais au moins, le capital est préservé.
Placements à taux fixe : la tuile !
Si vous possédez des placements dont la rémunération est fixe, comme des obligations, les prix auront beau s’emballer, votre taux ne bougera pas. Chaque point d’indice des prix en plus, c’est autant de perdu pour vous. C’est le revers de la médaille d’un placement ultra-sécuritaire. En période d’inflation, il faut alléger ses positions sur ce type de placement.
Placements à rendement variable : à suivre
En théorie, vos placements à rendements variables suivront plus ou moins la hausse des prix. C’est le cas de l’assurance-vie en unités de compte ou de l’épargne bancaire dont les rendements devraient, sur le papier, suivre la courbe de l’inflation. Tout dépend de la qualité du gestionnaire et de ses choix d’investissements, autant de paramètres sur lesquels vous n’avez pas beaucoup de visibilité : à suivre au plus près.
Actions cotées : vérifiez les modèles économiques
Les actions cotées reflètent la valeur boursière des entreprises, par leur valeur intrinsèque (lire cet article). En période d’inflation, il faut miser sur les sociétés dont le modèle économique permet la répercussion de la hausse des prix d’achat (plus élevés du fait de l’inflation) sur les prix de vente. C’est le cas, en général, des modèles B to C : quand les prix augmentent, les salaires aussi et les entreprises peuvent vendre à des prix plus élevés. Les sociétés qui ne pourront pas le faire devront réduire leurs marges. Cependant, les sociétés fortement endettées à taux fixe et capables de répercuter la hausse des prix, verront l’inflation effacer une partie de leur dette : un bon point pour elles.
Private equity : à défaut de pouvoir agir, vous avez le temps
Si vous détenez des actions de sociétés non cotées, sans liquidité des actions, vous ne pouvez que miser sur le temps long. Vérifiez tout de même le modèle économique de vos investissements et leur capacité à faire passer l’inflation dans leurs prix de vente. A défaut, influez sur l’équipe dirigeante pour quelle fasse évoluer son modèle, si toutefois elle le peut. (Comment investir dans une jeune entreprise en réduisant ses impôts ? lire cet article).
Cryto-monnaies : imprévisibles
Les crypto-monnaies ne sont pas corrélées à des actifs tangibles. En cas d’inflation forte, période encore inconnue depuis l’apparition des crypto-monnaies, elles peuvent soit s’effondrer, par manque de visibilité sur leur valeur réelle, soit servir de valeur refuge (le Bitcoin à 146 000 $ ? lire cet article), justement parce qu’elle n’ont pas de valeur en relation avec des actifs tangibles soumis à l’inflation. Vous êtes joueur ? Bonne chance !
Immobilier : la bonne affaire
L’immobilier est le grand gagnant de l’inflation. Dans la valeur des biens immobiliers, une grosse partie provient de la capacité des ménages à les acheter. Or, l’expérience des années inflationnistes, comme les décennies 70 et 80 en France, montrent que les prix immobiliers suivent l’inflation, voire bénéficient d’une surcote du fait d’être des actifs tangibles, donc sécurisants. Si vous êtes propriétaire, l’inflation fera monter la valeur faciale de votre bien, mais sa valeur relative restera similaire. Vous pourriez même probablement bénéficier de l’inflation. Si vous avez emprunté à taux fixe pour financer votre bien, vos remboursements resteront stables alors que vos revenus augmenteront avec l’inflation.
Même chose si vous avez investi dans l’immobilier locatif : le montant des loyers suivra l’inflation des prix à la consommation. Vos revenus locatifs garderont leur valeur relative (même si les prix affichés montent).
L’excellente affaire de l’inflation est pour les investisseurs immobiliers (lire cet article sur l’investissement locatif) qui se sont endettés à taux fixe. Si vous avez investi en 2020 – 2021, vous avez souscrit des emprunts avec un taux annuel légèrement supérieur à 1% par an. Comme vos loyers suivront l’inflation, si celle-ci monte à 10 %, vos revus locatifs en feront de même et vous rembourserez toujours votre prêt bancaire avec des échéances fixes. C’est donc l’inflation qui remboursera en partie votre prêt : magique !
Reste que si bon nombre de chefs d’états verraient d’un bon œil le retour de l’ardoise magique de l’inflation, ce n’est pas le cas de leurs créanciers (principalement des états et des banques) ni des banques centrales dont le dogme depuis plusieurs décennies est la stabilité des prix.
Plus que jamais, inflation ou pas : ce n’est pas le prix affiché qui compte, mais la valeur intrinsèque.
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