D’abord, la blockchain. Les NFT lui sont étroitement liées, comme les crypto monnaies. La logique est qu’une chaîne d’ordinateurs indépendants les uns des autres sont à même de tracer la propriété d’un bien numérique, aussi bien, voire mieux qu’un organe centralisateur.

Ensuite, les « actifs non fongibles ». Commençons par définir ce que sont des actifs fongibles. C’est le cas d’un billet de banque, d’une action ou d’un lingot d’or. Chaque exemplaire est comparable à un autre et échangeable à la même valeur. Mais qu’en est-il d’un bien comme un immeuble ou une oeuvre d’art, tout à fait unique ? On dit qu’il est « non fongible », car il n’a pas de strict équivalent. Si le bien est non fongible et sans équivalent, c’est qu’il ne peut avoir qu’un seul propriétaire.

Les NFT – pour Non Fongible Token – sont donc des jetons non fongibles et représentent un actif numérique unique.

C’est là que nait l’engouement des NFT pour les œuvres d’art numériques. Entendons-nous bien, par « œuvre d’art numérique », on parle surtout de « numérique » : une photo, un gif, un tweet… tout est bon du moment que ce soit numérique.

L’idée est que, si tout un chacun peut voir une image ou un tweet sur un appareil numérique, cet élément numérique n’a qu’un seul propriétaire et c’est la blockchain qui peut en attester.

L’autre idée, c’est que si l’œuvre d’art numérique n’a qu’un seul propriétaire, celui-ci peut changer. Et qu’est-ce qui fait qu’un propriétaire cède son œuvre d’art à un autre propriétaire – dument attesté par la blockchain ? C’est qu’il l’a vendue.

Et pour organiser la vente d’une oeuvre d’art, quoi de mieux qu’une vente aux enchères numérique ? D’où l’émergence de plateformes d’enchères comme Rarible.com ou Opensea.io qui s’apparentent, dans leurs présentations, à des réseaux sociaux. C’est que pour vendre ou pour acheter, il faut être en relation avec des acheteurs et des vendeurs. Et c’est ainsi que les vendeurs de NFT proposent les œuvres qu’ils possèdent à des acheteurs potentiels qui surenchérissent pour faire l’acquisition de ces biens numériques, comme ce gif de quelques secondes où l’on voit un parapluie tourner sur lui-même, proposé à 0,0001 WETH, soit 0,16 $, par “yrac” mais que ” DomT420 ” est prêt à acquérir pour la modique somme de 0,0008 WETH soit tout de même 2,51 $, 15 fois plus cher ! Comment ce malheureux et moche parapluie a-t-il pu voir sa valeur multipliée par 15 en quelques jours ? Mystère. La seule explication logique est sans doute que DomT420 espère faire la même culbute que celle réalisée par son vendeur, et placer rapidement son parapluie numérique à plus de 37 $… Il suffit pour cela qu’un autre acheteur sur-enchérisse avant de lui-même revendre “son” oeuvre à plus offrant. Bienvenue dans le très spéculatif monde du metaverse.

Et c’est là qu’interviennent les crypto-monnaies. Pour acquérir des NFT, il faut les payer en cryptos. Logique, on est numérique. Ethereum, Bitcoin sont les plus courantes. D’où un second levier de spéculation : si vous possédez un NFT pour lequel les enchères montent, valorisé, disons 0,01,  Bitcoin, et que celui-ci prend 30 % en quelques jours, votre capital virtuel augmente d’autant. Merci le parapluie !

Spéculation puissance 3

Cette spéculation puissance 3 (œuvre numérique + enchères + cryptos) seraient plutôt drôle si le réel n’avait pas rattrapé le virtuel :

  • le premier tweet de Jack Dorsey, fondateur de Twitter, vendu près de 3 millions de dollars (pour cette œuvre magnifique : « just setting up my twttr »)
  • une vidéo retirée de YouTube, vendue en mode NFT pour 693 000 $
  • et la fameuse œuvre « Everydays: The First 5000 Days » de l’artiste Beeple, un collage numérique vendue chez Christie’s pour 69,3 millions de dollars.

Si vous souhaitez vendre vos œuvres numériques au plus offrant, utilisez les plateformes citées ci-dessus. Attention, en fonction des heures de négociation et des cryptos utilisées, les plateformes vous factureront des « frais de gaz » qui peuvent monter jusqu’à 100 $ par vente. Tout le monde doit gagner sa vie, mais ça fait un parapluie pas très rentable…

Evidemment, dans ce far west numérique qu’est l’univers des cryptos, tous les cow boys artistes tentent leur chance. Le groupe de luxe Hermes vient d’attaquer en contrefaçon l’artiste Mason Rotschild, qui commercialise des centaines de “MetaBirkin”, des NFT inspirés du célèbre sac à main de la marque qui qualifie le meta-artiste de “spéculateur numérique qui cherche à s’enrichir rapidement”.

Faut-il acheter des NFT ?

Vous pouvez tenter votre chance NFT. C’est plus drôle que le casino, mais tout aussi improbable. Certes, il y a déjà eu et il y aura des gagnants. Et beaucoup de perdants, noyés sous leurs frais de gaz et abonnés à des enchères microscopiques pour des “œuvres” sans avenir. Et il y aura quelques pépites : c’est la magie de l’art, c’est imprévisible et ça a un prix.

Vous pouvez aussi tenter de faire fortune en vendant cette fameuse photo IMG_2025, oubliée dans les bas fonds du dossier “photos” de votre smartphone, opportunément rebaptisée « Kiki au soleil couchant, plage de Trégastel, summer 2021 ». Qui sait : un crypto-milliardaire jettera peut-être son dévolu sur votre œuvre.

 

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