Chaque année, entre 1 million et 1,5 million de ménages contractent un prêt immobilier en France, en majeure partie pour financer l’acquisition d’une résidence principale. Hors, depuis quelques mois, la proportion de prêts refusés par les banques explose. La raison ? Le taux d’usure.

Taux d’usure : kezako ?

Lorsque que vous contractez un prêt – pas seulement immobilier – les conditions de ce crédit accordé par les banques sont encadrées par le taux d’usure. Il plafonne le taux d’intérêt auquel une banque peut vous accorder un prêt. A titre d’exemple, au 1er octobre 2022, le taux d’usure pour un prêt sur 20 ans à taux fixe est de 3,03 % par an. C’est la Banque de France qui fixe ce taux en majorant d’un tiers le taux effectif moyen des banques (TAEG). Autrement dit, d’un côté, ce taux protège les emprunteurs de conditions qui pourraient être excessives ; de l’autre, il prive de possibilité d’emprunt ceux dont le dossier est « trop juste ».

Comment le taux d’usure est-il déterminé ?

Rappelons que le taux d’emprunt global (TAEG) comprend l’ensemble des frais qu’une banque va vous demander de supporter pour pourvoir emprunter : taux d’intérêt, commissions, et assurance emprunteur.

Lorsque qu’un emprunteur sollicite une banque pour emprunter, celle-ci va appliquer un scoring qui permettra d’attribuer un TAEG à l’emprunteur. Comprendre : tous les emprunteurs ne se voient pas attribuer le même taux dans la même banque. Par exemple, un fonctionnaire à l’emploi garanti bénéficie d’un scoring nettement meilleur que son équivalent en CDD, même mieux payé. Plus une banque estime le profil de l’emprunteur à risque, plus elle se couvrira par un taux d’intérêt élevé. Même chose pour l’assurance – emprunteur : plus la compagnie d’assurance estime le risque élevé, plus elle proposera des taux d’assurance élevés. Un emprunteur senior paye plus cher son assurance emprunteur qu’un trentenaire en bonne santé.

Il arrive donc que le TAEG théorique dépasse le taux d’usure fixé par la Banque de France, auquel cas, le prêt est refusé. Et c’est ce qui arrive souvent en ce moment, puisque que les taux ayant globalement monté, les banques achètent plus cher l’argent qu’elles vont elles-mêmes prêter.

Comment contourner le blocage du taux d’usure ?

Il existe plusieurs moyens de contourner ce blocage. Autrement dit, il existe plusieurs façons de faire baisser le TAEG que la banque peut vous proposer. En voici quelques-uns :

  1. Elaborer votre projet immobilier avec votre banquier

Trop d’emprunteurs arrivent chez leur banquier en disant : « J’ai besoin de tant ». Mauvaise démarche. La bonne façon de procéder est de co-construire votre projet avec votre banquier. En jouant sur tous les aspects, apport, durée, co-emprunteurs… il vous aidera, dans la mesure du possible, à présenter un dossier qui passera sous les fourches caudines du taux d’usure.

  1. Faire jouer la concurrence entre les banques

Les banques adorent le crédit immobilier. Non pas qu’elles y gagnent grand chose, mais surtout, elles fidélisent leurs clients pour de nombreuses années, autant de possibilité d’ «  équiper » leurs clients, comme elles se plaisent à le dire, donc à leur vendre tout un tas de produits, bancaires ou autres. Au moment de faire un prêt immobilier, il faut faire jouer la concurrence : une banque qui voudra s’attirer votre clientèle sera plus encline à vous consentir un taux d’emprunt plus bas.

  1. Faire jouer la concurrence sur l’assurance – emprunteur

Vous pouvez faire jouer la concurrence sur la partie assurance de votre prêt. Depuis le 1er juin 2022, pour les nouveaux crédits, la Loi Lemoine autorise les emprunteurs à dissocier la partie financière de la partie assurance de leur emprunt, de façon plus libre, et donc de faire jouer la concurrence sur la partie assurance – emprunteur. Gagner quelques points sur cette partie, c’est parfois passer du bon côté du taux d’usure et se voir accorder son prêt. De la même façon que vous devez faire la tournée des banques, interrogez également plusieurs assureurs.

  1. Emprunter à taux variable

Les prêts à taux variables sont des prêts dont le taux peut varier dans le temps. Fortement décommandés, car sans visibilité claire, ils ont toutefois un attrait appréciable : il sont souvent proposés avec des taux attractifs en début de prêt, et donc permettent dans certains cas de passer sous la barre du taux d’usure. Tout l’enjeu de l’emprunteur sera de renégocier son prêt dans le futur. A manier avec précautions.

  1. Emprunter via une SCI

Les Sociétés Civiles Immobilières (SCI) sont des sociétés destinées à gérer des projets immobiliers, avec deux associés au minimum. Elles peuvent se faire accorder des prêts immobiliers par les banques et, sous certaines conditions, celles-ci les considéreront comme des « emprunteurs professionnels » qui ne sont pas soumis à l’encadrement du taux d’usure qui ne concerne que les particuliers. Vous emprunterez peut-être à un taux élevé, mais vous emprunterez.

 

Dans tous les cas, si vous ne pensez pas avoir la culture financière suffisante, lisez, apprenez, et faites vous conseiller (par un notaire, ou un courtier, par exemple) et vous aurez plus de chances de débloquer un projet immobilier financé par un prêt.

 

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